La villa de Sion avait été
construite dans les années 60 à proximité de la plage. On n’y accédait pas
directement par la route centrale, il fallait s’aventurer un peu dans les allées
pavillonnaires avant d’y parvenir.
Large et cossue, elle témoignait
encore des heures joyeuses qui s’étaient écoulées ici. Quelques ardoises de la
toiture claquaient au vent, l’enduit
crémeux s’effritait un peu plus chaque jour, le bleu des persiennes n’était
plus si bleu mais les lettres arrondies et élancées du mot Sunset accrochées à la façade rappelaient à ceux qui voulaient bien
s’y arrêter qu’elle en avait vu des soleils se lever et se coucher cette
maison-là. Depuis plus de deux ans maintenant, elle restait fermée.
Les hautes herbes engloutissaient
le jardin, les pissenlits et les broussailles recouvraient presque en totalité
la terrasse, les arbres fruitiers pliaient sous le poids des figues, des prunes
et des pêches qui n’étaient plus cueillies.
On aurait pu penser que la villa était
à vendre mais aucune pancarte ne l’indiquait.
Elle avait été abandonnée un été.
Un été où il avait fait particulièrement chaud, si chaud que chacun se
claquemurait chez lui pour y faire le noir complet.
Simone y avait passé son dernier été,
celui de ses 83 ans, celui de sa vieillesse désormais affichée aux yeux de
tous. Cette villa était celle de ses enfants. Elle en avait les clés. Ses
enfants qu’elle ne voyait plus.
Une villa au bord de la mer, c’était
bien pour y mourir. Confortable et spacieux. Propice à la mise en scène.
Et puis, cela leur ferait une drôle
de surprise à ses enfants quand ils ouvriraient la porte de sentir l’odeur de
sa mort et de découvrir comme elle avait tout bien préparé.
Pascale Gatineau